L'Église ne reviendra pas avant 1965 – et c’est une grâce

 

L'Église ne reviendra pas avant 1965 – et c’est une grâce



Il y a des âmes en soutane et des cervelles en dentelle qui geignent encore dans les confessionnaux vidés des années cinquante. Ils prient pour que l’Église revienne à ce qu’elle fut avant 1965, comme s’ils appelaient un mort à marcher, une ombre à régner, une statue à parler. Ils rêvent d’un monde qui sent l’encens frelaté, les manches amidonnées, et les tabernacles fermés comme des cœurs. Ils ne veulent pas le Royaume, ils veulent l’ordre. Ils ne veulent pas le Christ, ils veulent les rideaux.

Mais l’Église ne reviendra pas avant 1965,
et c’est une grâce, oui, une miséricorde brutale, un coup de tonnerre évangélique.

Car cette Église-là, pour belle qu’elle fût, avait ses plaies bien cachées.

Elle alignait les agenouilloirs comme on aligne les soldats,
elle prêchait l’amour du prochain avec des gifles liturgiques,
elle parlait du Ciel avec la voix d’un huissier de tribunal.
On y entrait par habitude, on y restait par crainte,
et quand l’Esprit s’est mis à souffler, c’est l’habitude et la crainte qui sont parties.

Et c’est tant mieux.

Non, je ne crache pas sur la Tradition.

Je l’aime. Je l’adore même, comme un fils qui revient vers sa mère meurtrie.
Je pleure devant une messe chantée dans une sacristie glaciale,
je défends la beauté, le silence, la majesté du rite romain comme un chevalier défend un autel.
Mais je refuse la momie, je récuse le passé mythifié, je vomis la jansénisterie déguisée en zèle.

Car le Christ ne reviendra pas à travers un retour en arrière.
Il n’est pas un Dieu-musée, il est le Vivant.

Ceux qui veulent restaurer l’Église d’avant la fissurent encore.

Ils veulent la discipline sans charité,
la beauté sans pauvreté,
le latin sans larmes.

Mais je dis, moi, pauvre imbécile conservateur revenu du pays des dentelles :

Mieux vaut une Église humiliée, pauvre et méprisée, qu’une Église orgueilleuse, rangée comme un buffet Louis XV.

L’Église ne reviendra pas à 1965. Parce qu’elle a mieux à faire.

Elle doit redevenir sainte, pas simplement élégante.
Elle doit convertir, pas simplement maintenir.
Elle doit ressusciter, pas simplement ressasser.

Et cela ne se fera ni dans les salons où l’on disserte sur les rubriques liturgiques,
ni dans les caves où l’on rêve à l’Inquisition comme d’un fantasme érotico-spirituel.

Cela se fera dans les ruines, les marges, les prisons, les familles éclatées,
par des prêtres qui ont plus de prières que de décorations,
et des fidèles qui connaissent la croix mieux que le Credo.

Une Église jeune qui revient par la face nord

Et pourtant... quelque chose revient. Pas l’Église d’avant, non. Mais le feu du commencement.

Dans cette Église vieillie, fatiguée, souvent moquée, je vois des jeunes, oui, des jeunes — pas ceux des sondages, mais ceux de la grâce.

Ils ont 18, 20, 25 ans.
Ils ne hurlent pas « Alléluia » comme à la télé.
Ils ne tweetent pas le Credo.
Ils se taisent, ils écoutent,
ils se font baptiser dans des piscines portables ou des bénitiers poussiéreux.
Et le dimanche, ils viennent sans forfanterie,
s’agenouillent, ne communient pas encore,
parce qu’ils ont compris ce que c’est : le Corps du Christ, pas un biscuit.

Ils ne sont pas spectaculaires,
ils ne remplissent pas les stades,
mais ils remplissent les fonts baptismaux.

Ils sont là, comme une braise sous la cendre,
comme le petit reste d’Israël,
ceux que Dieu garde pour Lui quand tout s’écroule.

Ce renouveau — car oui, appelons-le ainsi —
il existe aussi chez les tradi, chez les charismatiques, chez les paroissiens ordinaires.
Il n’a pas d’étiquette.
Il a des visages, des prénoms, des vies changées.

C’est le renouveau de ceux qui ne demandent pas que l’Église redevienne grande,
mais qui veulent qu’elle redevienne sainte.

Conclusion : Ne demandons pas la gloire, demandons le feu

Alors je crie, comme un chien de garde sur les ruines :

Qu’on ne me parle plus de restauration morte.
Je veux la Résurrection vivante.

Et je dis, moi, fils bâtard de Vatican II et orphelin de la Tradition :

L’Église ne reviendra pas avant 1965 — et c’est une grâce.
Parce qu’elle est appelée à aller plus loin encore.

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